jeudi 31 mars 2011

Ce samedi 2 avril à Dole


Je serai sur le stand Sarbacane pour dédicacer Le carambar sans "A" a un drôle de goût, J'ai mis du sable dans mon cartable, Comme si... La grande roue et En voiture, en voiture !
Les amoureux de livres sonores pourront aussi se procurer Il faut sauver le prince Victor sur le stand Benjamins Média.
À tout bientôt.

mardi 29 mars 2011

On danse... Et toi, tu danses ?


La danse, c’est quoi ?
Deux pieds, deux bras, dix doigts (ici cinq, formant le mudra du lotus en bharata natyam, danse classique indienne)...


... une tête, un regard et bien plus encore. C’est le corps qui bouge : tout en même temps ou tout séparément. Il existe tant de façons de danser, de s’exprimer, de se déplacer ! Ci-dessous, Rosas Danst Rosas d'Anne Teresa de Keersmaeker, créé en 1983 et encore joué aujourd'hui.


On danse de côté, en avant, en arrière, en sautant ou bien porté (danseurs d'Alvin Ailey)...


On danse avec ou sans musique (ci-dessous, L'orchestre de l'Opéra d'Edgar Degas, vers 1870). En rythme ou non ?


On danse en équilibre sur une jambe ou en vrille sur la tête (Sidi Larbi Cherkaoui et Akram Khan dans Zero degrees, 2005).


On danse en tutu (Anna Pavlova en cygne blanc, le cygne noir du Swan lake de Mats Ek, Robin Orlyn bataillant contre le carcan du classique), en robe (celle de Sara Baras, reine du flamenco rappelle celle de Loïe Fuller, pionnière de la danse moderne) ou en pantalon ? Sur pointes, en claquettes ou en baskets et autres chaussures de ville (Le lac des cygnes vu par la compagnie Divergences).







On danse aussi en costume-personnage (pour Tricodex, 2005, tout comme pour ses Codex et Decodex, Decouflé s'est inspiré du Ballet triadique d'Oskar Schlemmer, 1922).



On danse, seul ou à deux (Les danseurs de tango par Fernando Botero) à cinq (La danse de Matisse) ou à cent, on danse !



On danse depuis que l’on sait marcher. On danse pour communiquer, pour fêter un événement (danse rituelle guerrière masai), pour se révolter ou pour se montrer. On danse pour soi, ou pour les autres (Roi-Soleil, Louis XIV fut l'un des premiers à élever la danse au rang d'art ; on lui doit l'Opéra Garnier et son école).



La danse, ça bouge, du ballet classique (la très romantique Carlotta Grisi dans le rôle de Giselle en 1841, volant au-dessus de sa tombe, normal pour un fantôme !) au spectacle contemporain (The show must go on, de Jérome Bel en 2001)...



On danse, du chorégraphe (Roland Petit photographié par Izis) à l’interprète (Jean Babilée, dans Le jeune homme et la mort, 1946)...



La danse, ça donne à voir, du décor peint à la vidéo dansante (Lulu de Mark Tompkins, La table de sable de l'artiste Magali Desbazeille pour la compagnie Damaged goods de Meg Stuart, Marionnette, de Decouflé)...




La danse, ça parle, d’une belle histoire au sujet politique (La table verte, de Kurt Jooss, 1932)...


Et ça se promène, ça échange, de la rue à la scène et de la scène à la rue (Transports exceptionnels, par la compagnie Beau geste de Dominique Boivin)...


... ou ailleurs encore (Isadora Duncan, 1877-1927) !


De l’Afrique à l’Asie, j'ai souhaité, avec ce livre publié chez La Martinière Jeunesse, poser une question à tous ceux et celles qui aiment le mouvement, ou qui souhaitent le découvrir : et toi, tu danses ? Pourquoi pas comme lui ?


La danse racontée aux enfants fait partie d'une collection de livres de photos et j'ai activement participé à leur choix en connaissance du sujet, et parce que je refusais de signer un livre trop "classique". Ce qui explique par exemple le compromis de la couverture : un chorégraphe "néo-classique", Benjamin Millepied, qui l'a emporté face à un énième ballet classique...


La très belle photo qui suit (à l'endroit et à l'envers pour les gardes) ouvre et referme le livre, invite à un aller-retour. Elle est tirée du spectacle A cet endroit, d'Odile Duboc (2007) :


Hélas ! on ne peut pas tout mettre, pas tout avoir, pas tout obtenir. C'est pour cette raison que la collection panache les photos avec des illustrations présentées en cabochons. Elles sont signées, pour ce titre, Marie Doucedame. Ci-dessous, l'affiche art déco de L'après-midi d'un faune d'après Léon Bakst (1912).

Mais je vais profiter de ce blog pour poster quelques photos que j'aurais aimé voir dans le livre, et remercie au passage les photographes pour leur gentillesse.

La double page consacrée à L'après-midi d'un faune, qui marque avec Le sacre du printemps (1913) un acte de modernité, montre la façon dont chaque danseur interprète son personnage, et des pas très précis. Pour compléter les quatre danseurs choisis pour le livre (Rudolf Noureev, Nicolas le Riche, Olivier Dubois et Emmanuel Eggermont, en voici quelques-unes en supplément, dans l'ordre Emmanuelle Huynh, Georges Momboye, Marie Chouinard, Serge Lifar et Vaslav Nijinski bien sûr, le créateur de la créature en 1912.






Ce livre est dédié à Odile Duboc (ci-dessous dans O.D.I.L. en 2006, et en suivant le lien, un extrait du spectacle Rien ne laisse présager de l'état de l'eau, 2005), Merce Cunningham photographié par Annie Leibovitz (et un court extrait de Beach birds ainsi qu'un lien vers un portrait en anglais) et Pina Bausch (ci-dessous et en suivant le lien dans Cafe Muller), trois figures de la danse disparues l'année dernière.



lundi 14 mars 2011

Quand Vélasquez passe sur le pont, analyse de l'album "Moi, princesse Marguerite"

La Marguerite dont il est question, c'est l'infante Marguerite-Thérèse d'Espagne, que voici, peinte par Xavière Devos, d'après Diego Vélasquez :


Que voilà, peinte par Pablo Picasso, toujours d'après Vélasquez :


Quant au pont... Il s'agit du pont des arts, et pas celui qui surplombe la Seine, lien entre le musée du Louvre et l'école des Beaux-Arts. "Pont des Arts" est le nom d'une collection chez Élan vert. On y trouve des oeuvres d'art, jardins dans lesquels on se promène le temps d'une fiction. Le pont est donc celui de l'histoire qui nous mène à petits pas jusqu'à l'art. Adepte de ce point de vue (approche subjective, sensible de l'art, et non didactique), j'avais déjà participé à l'excellente revue "Dada", quand elle contenait encore de la fiction à l'époque de ses créateurs Héliane Bernard et Alexandre Faure. Le principe était identique : écrire un texte qui invite le lecteur à regarder l'art comme une oeuvre vivante, avec des personnages qui parlent, agissent, ressentent, etc. L'imaginaire de l'auteur proposant au lecteur / spectateur de faire le pas à son tour, et d'inventer une histoire. Car l'écriture finalement, n'est autre qu'un regard sur le monde. La différence avec l'écriture d'un album normal repose ici en son point de départ. D'un côté la réalité, de l'autre une image. Image, parce que cela peut être une sculpture, une photo, une peinture.
Monde-art...


Mon choix s'est porté sur Les Ménines de Diego Vélasquez car c'est un tableau fascinant, mystérieux. Peint en 1656, il est aujourd'hui au musée du Prado, à Madrid.
Quel en est le sujet ? Qui peint qui ou quoi ? Qui est qui ? Le titre renvoie aux ménines, ces demoiselles d'honneur au service de l'infante Marguerite, mais elles ne constituent pas le sujet principal de l'oeuvre. Alors qui ? La princesse ? Elle est au premier plan, certes, mais ce n'est pas elle. Je l'ai pourtant élue "prem's" dans mon texte, elle en devient la narratrice car dans le tableau elle a l'air de commander, de poser, d'en imposer.
"A l'air", car celui qui commande somme toute, c'est le peintre.
Que peint-il, déjà ? Pas l'infante donc, il ne va pas représenter la fille du roi Philippe IV de dos. Ou bien si, l'infante, mais pas que.
Les ménines, l'infante, mais aussi les nains qui "amusaient" la cour, et dont la laideur et les difformités physiques ou mentales rappelaient aux gens normaux et sub-normaux (de sang royal, au-dessus de tous) qu'ils étaient beaux et intelligents.


Et si le sujet principal était le peintre lui-même ? Il se représente en train de peindre la vie à la cour. Est-ce tout ? Que fixe-t-il ?
Il fixe ce qui est hors cadre. Nous par exemple, qui le regardons. Mais avant nous, il les peint, eux, on les voit dans un miroir situé à l'arrière-plan, près d'une porte dérobée.
Eux...


Eux !


Mais eux !


Mais eux, voyons !


Pour faire un portrait... Il faut des tonnes de patience, rester des heures, des jours sans bouger, garder la pose... Eh oui, poser pour l'éternité demande du temps. Contre l'immobilité, contre l'ennui, un remède : Marguerite !
Marguerite et sa petite cour de ménines, de nains et de gardes vient donc divertir le couple royal en train d'être immortalisé par Vélasquez.
Et que fait la fillette pour s'occuper ? Dans mon histoire, elle joue à "un, deux, trois... soleil". Ce qui me permet de faire entrer dans la pièce du palais tous les personnages du tableau et de les faire se déplacer dans l'espace du même tableau. Ainsi, le lecteur de l'album découvre peu à peu qui est qui, qui est où, et ce jusqu'à ce que chacun gagne sa place définitive. Le peintre dit alors :
- Là ! Vous êtes tous bien où vous êtes. On ne bouge plus !


Xavière Devos, l'illustratrice, a joué le jeu avec talent, alternant les points de vue, les angles d'approche, de face, de côté, derrière, plan large, rapproché... choisissant tantôt le regard de la princesse, tantôt l'oeil du peintre, et promenant celui du spectateur, bien sûr.
L'une des multiples caractéristiques des Ménines est qu'on ne peut voir tous les personnages en même temps, on est obligé de passer de l'un à l'autre, de parcourir l'oeuvre.
Xavière et moi avons fait de même avec l'illustration et le texte.
Regardons encore une fois Les Ménines, différemment peut-être.


On les retrouve là, sous le pinceau de Picasso qui en réalise toute une série :
il peint 58 tableaux entre le 17 août et le 30 décembre 1957.



Moi, princesse Marguerite joue au jeu de la pose-statue-soleil chez vos libraires chouchous dans la très belle collection "Pont des arts", Diego Vélasquez par Xavière Devos aux côtés de Marc Chagall par Élise Mansot, Paul Klee par Peggy Nile, Joan Miro et le Douanier Rousseau par Vanessa Hié, portés par des auteurs tels que Véronique Massenot et Hélène Kerillis, entre autres. Une collection à découvrir absolument !
Comment finir ? Par une porte qui ouvre sur tout ce qu'on veut.